Les Noirs de Lucifer
Chapitre I
Lucifer
Samnael Sickius
Le Buveur de Sang
LA LUNE DE LUCIFER était bleue. Pas bleu comme le ciel, ou comme l'océan, mais plutôt bleu comme le saphir. Son éclat reproduisait la lumière de son soleil blanc et la réfléchissait à travers le vide. Même à travers du hublot sécurisé, Setho parvenait parfaitement a la distinguer. Bleue, lisse, en un mot parfaite. Aussi parfaite que Lucifer était un monde imparfait.
Lucifer, la Pierre du Mal, le pire repaire de criminels du secteur d'Ovion. Un monde aux sols et aux roches noirs comme le charbon, entrecoupé ça et là de rivières de lave et de chaînes volcaniques. Les torrents de feu projetaient un halo rougeoyant autour de la planète. L'enfer en tous points de vue. C'était sans doute pour ça qu'ils étaient les meilleurs. Eux, les Noirs de Lucifer.
Oh bien sûr Setho en avait entendu parler à l'école militaire impériale de Rhea, mais personne n'avait sérieusement interprété les paroles de leur instructeur.
Il avait dit d'eux qu'ils étaient les meilleurs et les pires a la fois. Il avait dit d'eux que leurs actions contrastaient avec eux aussi violemment que leur planète contrastait avec sa lune. Setho en avait fait ses idoles. Cruels, mais justes, horribles, mais héroïques. A l'instant où il avait vu Lucifer de ses propres yeux, son désir de rencontrer ses héros s'estompa.
~~Dix minutes avant embarquement~~
La voix froide et métallique de l'adjudant chargée de la communication le tira de ses rêveries et il réajusta la bandoulière de son fusil sur son épaule gauche, la droite ayant été démolie par un tir de bolter. L'essentiel des nerfs avaient été sauvés. Cela avait facilité la prise de sa prothèse synthétique. Mais ça n'enlevais pas la douleur.
Quand Setho parvint au pont d'embarquement, celui-ci était déjà bondé. Gardes impériaux, auxiliaires et de nombreux autres volontaires parmi l'équipage du "Valiant Knight" embarquaient dans les Stormbirds et les Walkyries.
« On tire au flanc Veers? »
Setho se raidit à la voix du sergent Zacharias Jones.
« Non monsieur. J'allais embarquer.
_On se détend Seth' on se détend. Je suis venu pour parler.
_Parler sergent?
_Oui. Vous savez comme moi que cette histoire de défilé du nouveau gouverneur dans les rues de Shadow Haven c'est de la bouffonnerie! On sait tous ici qu'on vient juste ici pour faire office de gardes du corps au nouveau dirlo. Ensuite on se taille en emportant le 13e de Lucifer. On sait tous ça.
_Où voulez-vous en venir sergent?
_J'y arrivait justement. Les « Noirs de Lucifer » sont des tarés, et je n'aime pas les tarés. Alors je veux que vous gardiez un œil sur eux ok?
_Pourquoi ne pas le dire a tout le monde?
_Non. Si tout le monde partage mon point de vue ça va finir en bain de sang! Héhéhé, non, croyez moi, je veux juste pouvoir faire confiance a quelqu'un pour que ce quelqu'un ne fasse pas confiance aux nouveaux arrivants. Pigé?
_Je crois oui...
_Bien alors au boulot! Vous êtes au transport n°7. »
~~Deux minutes avant embarquement~~ annonça l'adjudant a la communication.
****
« ILS ARRIVENT. Vous êtes sûr de vous Gabriel? » Interrogea un personnage en toges sales et noircies par la cendre.
« Bien évidemment, » répondit un homme en armure noire.
« Posez ce fusil, allons! Vous ne risquez rien ici... Bon. Mettons les derniers détails au point.
_C'est inutile, mes hommes connaissent leurs ordres. » L'homme rangea son arme. « Les Noirs feront ce qu'il y a à faire.
_Le 13e régiment peut-être... Mais pouvons nous compter sur le 1er?
_Les Beaux Diables? Aucune chance. Ces pleutres vont les accueillir à bras ouverts.
_Damnation. » L'homme en toge suait à grosses gouttes. « Et le 5e Bataillon? Les Chiens de Cerbère?
_C'est peu probable. Ils suivront les plus forts. Et avec ce croiseur en orbite, ça fait de nos invités les plus forts.
_D'abord mon affectation sur cette planète, puis ma destitution, et maintenant mes troupes me trahissent. Le sort s'acharnera donc sur moi jusqu'en enfer?
_Vous êtes déjà en enfer. » Rétorqua la silhouette en armure de jais. « Ne l'oubliez jamais gouverneur Semoran.
_Certes. Répétons nos leçons voulez-vous? Il faut être prêt! On ne tue pas un gouverneur impérial tous les jours! »
****
LE MODULE D’ATERRISSAGE chutait à toute vitesse. Les flammes léchaient sa coque et les turbulences le ballotaient comme une feuille. Les astartes à bord n’étaient pas impressionnés le moins du monde. Ils n’en étaient pas à leur première descente et sûrement pas à leur dernière si tout se passait bien. Les secousses redoublèrent. Ce n’était pourtant qu’un amuse-gueule en comparaison du tumulte qui les attendait au sol.
Un sifflement aigu retenti, suivi d’une explosion intense. Un obus devait avoir éclaté non loin d’eux. Les space marines restèrent impassibles. Certains commencèrent à réciter les chants de vengeance et de haine. Une lumière rouge vint éclairer l’intérieur du module. Le choc était prévu dans moins de trente secondes. Sickius vérifia une dernière fois que son chargeur était plein. Il ferma les yeux et respira lentement. Il était l’arme de l’Empereur et il déchaînerait son courroux sur les impies. Maintenant il était temps que l’ennemi se prosterne devant le maître de l’humanité.
Dix secondes.
Il ferma les yeux. Il était Samnael Sickius. Il était un Ultramarine. Il servait l’Empereur. Rien d’autre ne comptait à cet instant.
Le choc fut brutal et la coque trembla violemment. Les verrous sautèrent, les astartes défirent leurs sangles, les portes s’ouvrirent. Sickius et ses frères s’élancèrent, vers la mort et la gloire, pour l’Empereur.
Bataille de Saint-Severo, agri-monde de Fulvia.
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QUELQUES JOURS avant l’attaque sur Fulvia, Sickius avait consulté le chapelain Trajan.
Elianu Trajan était la personne la plus sage que Sickius avait jamais rencontré et il lui accordait toute sa confiance. Lors des jours sombres de ce qu’il appelait sa « chute », Trajan avait été le seul à croire en son désir de rédemption. C’est lui qui avait empêché le capitaine Sicarius de tuer Sickius. Il lui avait donné sa chance et en retour, Sickius lui vouait un respect éternel.
Il s’était rendu dans le Reclusiam du vaisseau, là où il était certains de trouver le chapelain. Le « Valin’s Revenge » était un vaisseau somptueux et son Reclusiam l’était tout autant. Sa structure de plafond en arc croisés était une prouesse d’architecture.
Il avait aperçu le chapelain de loin, facilement reconnaissable parmi les quelques autres frères présents grâce à son armure noire qu’il ne quittait que rarement. Sickius avait attendu la fin de la litanie quotidienne de son mentor pour venir lui parler.
« Monseigneur ? Puis-je vous parler ? »
Le chapelain sans regarder Sickius, commença à partir vers le fond du Reclusiam.
« Allons mon cher Samnael vous connaissez déjà la réponse. De quoi voulez-vous m’entretenir ?
_Et bien… J’ai entendu des rapports concernant Lucifer. On dit que le gouverneur va y être relevé de ses fonctions. Seigneur vous…
_Samnael, nous sommes frères vous et moi, pas de « seigneur » ici, dit Trajan toujours sans se retourner.
_Excusez moi, frère-chapelain, mais je repensais à Lucifer. Comme vous le savez c’est mon monde natal. Ce n’est pas qui j’y sois particulièrement attaché mais je connais le système. Le gouverneur n’acceptera pas d’être remplacé.
_En quoi cela concerne-t-il le chapitre ? Vous craignez une rébellion ? Lucifer fait partie du sous-secteur Helris, c’est la juridiction des Dark Angels.
_Certes, mais les Dark Angels sont actuellement en croisade dans le Gouffre de Sikops.
_Samnael. Le chapelain s’était retourné vers le marine. Je comprends vos inquiétudes, mais que voulez-vous que je puisse faire ? Arrêter la campagne de Fulvia pour rediriger la deuxième compagnie vers Lucifer ? Le capitaine apprécierait moyennement, déjà qu’il ne vous apprécie pas. Au lieu de pavoiser et de vous occupez des autres systèmes, récitez donc les litanies que je vous ai enseignées et concentrez-vous sur Fulvia.
_Je ne parle pas de toute la deuxième compagnie, ni d’arrêter la campagne.
_Alors ? Que préconisez-vous ?
_Je viens vous demandez d’intercéder en faveur d’un envoi de troupes sur Lucifer dès que la campagne sera achevée. Juste une escouade ou deux.
_Et je suppose que l’escouade Octavian en fera partie ?
_Oui.
_Je n’aime pas voir votre esprit occulté par les démons de votre passé. Vous voir retourner sur Lucifer en emmenant vos frères me plait encore moins. Cessez de penser à Lucifer, concentrez vous sur Saint-Severo et l’assaut prévu. Je parlerais de Lucifer au capitaine. Maintenant retournez vous préparer.
_Merci. Merci frère. »
Le chapelain fit un signe de tête, son visage toujours caché par son casque en forme de crâne. Il fit volte face et repartit dans la pénombre du Reclusiam. Trois jours plus tard, Samnael Sickius tombait des cieux sur Saint-Severo.
****
SETHO VEERS n’aimait pas les entrées dans l’atmosphère. Encore moins quand il était à bord d’une navette aussi fragile que le Stormbird dans lequel il était embarqué. Il réajusta son harnais et serra fermement le manche de son fusil radiant. Il vérifia une bonne vingtaine de fois que son respirateur était branché. Il ne voulait pas tomber malade dès son arrivé sur Lucifer. L’air irrespirable de la planète aurait rongé ses poumons en un rien de temps. Une secousse ébranla l’appareil.
« Pourvu que ça tienne » se dit-il. Setho gardait un mauvais souvenir de sa dernière descente atmosphérique en Stormbird. Il leur préférait de loin les immenses croiseurs Herculeus que la garde employait pour les assauts de grande envergure. Mais, le jour où le 18e Hektopolis disposerait d’un matériel comparable n’était pas encore arrivé.
Un nouveau fracas fit trembler la carcasse du vaisseau.
Un voyant vert s’alluma et la voie du copilote se fit entendre :
« Vingt secondes avant atterrissage »
Il resserra sa prise sur son arme et commença à prier l’Empereur pour que la coque tienne. Le sifflement des rétrofusées hurla à travers les tympans des gardes. Un ultime soubresaut leur indiqua que l’engin s’était posé. Ils défirent leur sangle, prirent leurs armes et formèrent deux lignes.
La porte arrière s’ouvrit dans un bruit sourd. Un panache de gaz toxique pénétra dans l’appareil. Les hommes commencèrent à sortir.
La première chose que Setho Veers aperçu de Lucifer fut un abominable volcan crachant lave et fumée. Même séparé d’eux par une mer de magma, la montagne restait terrifiante de hauteur.
La chaleur était accablante et le système de régulation de leur armure peinait à rétablir la température corporelle des gardes. Il suait déjà à grosse goutte et plaignait le Gouverneur Gerko qui descendait de sa navette personnelle. Le gouverneur disposait d’un équipement supérieur au leur, mais il avait fait le choix de venir tête nue par politesse. Mauvais choix.
Le gouverneur suffoquait et sa peau comme ses yeux étaient devenus plus rouge que la lave. Une des adjudantes qui l’accompagnait s’empressa de lui fixer un respirateur ainsi qu’une visière de protection intégrale. Gerko retrouva sa couleur normale et se remit à avancer.
Les gardes se mirent en lignes de façon à former un carrée parfait. Ils laissèrent une haie d’honneur au gouverneur Gerko.
En face d’eux se trouvait une petite estrade entourée d’une bonne cinquantaine de soldats aux armures noires. Sur l’estrade, un personnage en toges sales et noircies, accompagné d’un grand personnage à la cuirasse noir lustré, se tenait les bras ouverts vers les nouveaux arrivants.
« Seigneur Gerko ! Je suis le gouverneur Semoran. Bienvenue sur Lucifer ! »
****
LES PREMIERS TIRS partirent dans une série de claquements assourdissants. La réponse ne se fit pas attendre et très vite, l’escouade Octavian fut obligée de se mettre à couvert.
Sickius se releva une fraction de seconde pour situer son ennemi. Cela suffit.
Devant lui, plus haut sur la crête, solidement installée dans une des nombreuses excavations creusées sur le terrain, l’attendait une équipe d’armes lourdes de la garde traîtresse. Sickius se rabaissa juste à temps pour éviter un tir de l’autocanon ennemi. Un missile passa au dessus de leur tête et se brisa sur la coque d’un land-speeder. Ce dernier s’effondra au sol dans une gerbe de flammes qui aveugla tout le monde.
Hektor Fictus, le plus jeune des frères de l’escouade profita de ce léger éblouissement des renégats pour lâcher une salve de son fuseur directement dans l’autocanon. Un tir d’une rare justesse, mais l’escouade était réputée pour sa précision. La pièce d’artillerie explosa emportant avec elle deux de ses servants. Le survivant fut vite achevé. La logique et l’intelligence stratégique que chaque Ultramarines chérit leur aurait dicté de réfléchir à une stratégie d’approche, mais face à un ennemi si pitoyable, il n’y avait qu’une seule tactique envisageable. L’assaut frontal.
« En avant escouade ! Pour Ultramar, courage et honneur ! » Cria un space marine au casque rouge. Le sergent Janus Gantris sortit de leur abri et couru vers le haut de la crête. L’escouade Octavian reprit son cri et partit à sa suite vers la brume des hauteurs.
Malgré les nombreux filtres des optiques de son casque, Sickius ne parvenait pas à discerner quoi que ce soit dans le nuage de fumée qui recouvrait la cime de la colline. Aux côtés de l’escouade se trouvait le capitaine Sicarius et son escouade de commandement. Tranchant les traîtres qui se dressaient devant lui, Sicarius avançait à une allure soutenue et fut le premier à s’engouffrer dans le brouillard.
A sa suite se trouvaient le chapelain Trajan, exhortant les troupes, et l’escouade tactique Solinus. Ils voulaient être les premiers à suivre Sicarius, comme à Fort Telrendar. Les marines d’assaut de l’escouade Strabo ne leur laisserait pas cette chance. Propulsés par leurs réacteurs dorsaux, les astartes atterrirent dans le brouillard juste après le capitaine.
L’écho des premiers chocs, le grondement des lames automatiques et le claquement des bolters retentirent de concert. Les flashs des fusils lasers ennemis illuminèrent la brume.
Le sergent Gantris rejoignit à son tour l’opacité des vapeurs, suivi de son escouade. L’épaisseur de la fumée était telle que les frères de l’escouade Octavian faillirent se perdre de vue dès les premiers instants du combat. Les astartes progressaient rapidement.
Une dizaine de silhouettes surgit des volutes en hurlant et se jeta sur les space marines.
« Contact ennemi, feu ! Feu ! » Beugla Gantris.
Sickius abattit un des adeptes du chaos qui tentait de faire basculer frère Tretion. Les assaillants furent rapidement mis en déroute. Un cri rauque lui parvint de sa droite. Il tourna son arme juste à temps pour vider son chargeur sur une créature noire ailée. Le démon s’effondra puis tenta de se relever. Sickius lui écrasa le crâne de son pied. La créature s’évanouit dans une gerbe de flammes d’un rose malsain.
Deux autres de ces choses déboulèrent des ombres du brouillard pour piquer sur les frères de l’escouade Octavian.
« Des gargouilles !!! » hurla Sickius dans l’intercom d’escouade.
La première fut sommairement tué en vol, tandis que le second réussi à planter ses griffes dans le plastron de frère Veldor. L’astartes rugit de douleur et se débattit, mais le démon referma sa prise et lui brisa les os, lui perçant les cœurs. Veldor tomba au sol, désarticulé. La gargouille prit son envol pourchassée par les tirs de bolters des Ultramarines.
« Formation resserrée, position 7-4-2, en place ! » Ordonna le sergent Gantris.
Les marines se rapprochèrent les uns des autres en pointant leurs armes vers la brume. Autour d’eux, les flashs diminuaient, mais le vacarme des armes restaient intense. Cependant Sickius distinguait une sorte de chant qui résonnait à travers les nuages de la crête. Il avait tout d’abord cru que ce son provenait du chapelain Trajan et d’une de ses litanies, mais la langue employée n’était pas le gothique impérial. On aurait dit une espèce de râle tant la voix était caverneuse. Soudain il se rendit compte de ce que c’était, le ton de la voix, les intonations. C’était une prière.
Il voulut prévenir le sergent mais de nulle part surgirent plusieurs space marines du chaos en armure rouge. Des Word Bearers.
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LES PREPARATIFS pour le défilé avaient pris du retard. Trop de retard. Le gouverneur Semoran, apparemment peu pressé de quitter son poste avait proposé de remettre la cérémonie de passation de pouvoir au lendemain.
Vu qu’un jour sur Lucifer durait trente-deux heures au lieu de vingt-quatre, le seigneur Gerko était en droit de refuser. Une passation de pouvoir doit avoir lieu sous trente heures après l’arrivé du nouveau dirigeant, selon le décret 1-7-9 de Terra à propos des charges gouvernementales.
Mais Gerko avait accepté le report. Lui non plus ne semblait pas pressé. Les troupes du 18e Hektopolis se stationnèrent dans la caserne désaffectée de l’ancien régiment des « Démons Rouges », le 12e de Lucifer. Le hasard avait voulu que le 12e de Lucifer fussent anéanti par la horde d’Airain, un groupe de démon dirigé par un Buveur de Sang. Le démon rouge tuant les « Démons Rouges ».
Ça avait quelque chose de comique.
Ian Lons, un des caporals de Setho approcha de son lieutenant l’arme à la main.
« Lâche ça Lons, tu vas finir par tuer quelqu’un.
_Sauf votre respect lieutenant, c’est mon boulot. Et cet endroit pue.
_Bah ! C’est sûrement à cause des volcans, les vapeurs de souffre tout ça, même dans les bâtiments hermétiques on n’est pas à l’abri d’une fuite tu sais. »
Lons se mit à rire.
« Oserais-tu te moquer de moi caporal ? » questionna Setho.
« Non, non, par l’Empereur non. C’est juste qu’en disant ça pue, je voulais plutôt dire ça craint.
_Ah, euh…
_Non mais c’est vrai que maintenant que vous me le dites, c’est vrai que ça sent vraiment le souffre.
_Oui bon… donc, revenons à nos moutons. Qu’est-ce que tu redoute Lons ?
_Je sais pas. Mais quand même, le retard des préparatifs, les Noirs de Lucifer qui nous accueillent à bras ouverts, ils sont presque trop gentils. Personnellement je trouve ça louche.
_Alors toi dès qu’on te dit « bienvenue » c’est louche ? Remarque ça se comprend personne n’a vraiment envie de t’accueillir. » S’exclama Setho en riant.
« Eh ben ça alors ! Maintenant les officiers ont de l’humour !
_Je devrais te faire enfermer Lons… Mais tu as raison. Quelque chose cloche. Et j’en aurai le cœur net. » Il prit son fusil radian et se leva.
« Allons faire un tour. »
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SICKIUS MARCHAIT AU MILIEU DES CADAVRES, le regard vide. Il avait jeté son vieux casque maximus quelque part après avoir essuyé un violent coup de poing, qui avait cassé ses optiques. Il ne le cherchait pas.
Il cherchait les membres de son escouade.
Ça et là, les corps désarticulés fumaient encore. C’est alors qu’il les aperçu. Cinq astartes aux armures calcinées, à moitié enfoncés dans la boue et le sang et aux membres arrachés. Il en trouva un autre plus loin et réussi même à retrouver le corps de frère Veldor, dont le plastron brisé par la gargouille était entaché de terre et de cendres.
Il trouva le corps du sergent Gantris en dernier et versa quelques larmes de colères en lui ôtant la lance du corps. Satanée lance. Il ramena tous les cadavres dans le trou d’obus où il avait trouvé les cinq premiers. Il partit demander à l’apothicaire de prélever son dû chez les morts. Une fois l’avenir du patrimoine génétique assuré, il laissa le Techmarine Hephaïstion récupérer les quelques pièces encore en état sur leur armures. Cela fut rapidement terminé. Il ordonna ensuite à ses serviteurs d’enlever le reste de l’armure. Ils laissèrent les cadavres presque nus au fond du trou.
Avec l’autorisation exceptionnelle du capitaine Sicarius, Sickius versa l’équivalent de la moitié du réservoir de prométhéum du lance-flamme qu’il avait récupéré, à frère Beros de l’escouade tactique Fennion, sur les cadavres. Il usa de ce qui restait pour y mettre le feu. Le brasier s’éleva d’un coup et Sickius se trouvait alors dangereusement près des flammes mais il n’en avait cure.
Pour rien dans tout l’univers il ne se serait éloigné du bûcher et de ses neuf morts.
Il ne restait plus que lui maintenant, il était le seul survivant de l’escouade Octavian. Il était maintenant le sergent Sickius. Et il allait vivre pour eux.
Il allait survivre, survivre pour les venger.
Ainsi finirent les frères de l’escouade Octavian…
****
QUELQUES INSTANTS PLUS TÔT, la mêlée avait tournée au désastre stratégique. Les Word Bearers s’étaient précipités sur eux et frère Fictus, ne pouvant profiter de l’expérience comme les autres le firent, ne fut malheureusement pas assez vif et fut le second à tomber après frère Veldor. Les Ultramarines évitèrent de justesse les tirs de bolts et ripostèrent sans tarder. Mais au moment où leurs rafales partirent, les renégats s’étaient évaporés dans la brume. Un cri de fureur que Sickius aurait reconnu entre mille leur parvint. C’était le chapelain Trajan.
Le sergent Gantris l’avait entendu lui aussi et l’escouade se précipita à sa suite alors qu’il s’élançait vers le point d’où venait le hurlement. Ils formèrent une file indienne et progressèrent rapidement vers la crête. Sickius fermait la marche.
Autour d’eux la prière des Word Bearers, se fit de plus en plus distincte et le vacarme des armes redoublait d’intensité. Un soudain bruit de canon leur fit savoir que les predators avaient commencés à tirer. Après quelques tirs, Sickius se rendit compte d’une chose. Le bruit de l’autocanon. Il l’avait entendu tonner des centaines de fois et il savait que le son qui parvenait jusqu'à eux était légèrement différent. Ce n’était pas leurs predators. Un sifflement très fin parvint jusqu'à leurs oreilles.
Sa théorie se confirma dans une brutale explosion. Un tir d’autocanon ennemi les toucha et le centre de leur file se transforma en une boule de flammes incandescente qui projeta les rares survivants au sol. Lorsqu’ils se relevèrent, ils s’aperçurent horrifiés que cinq des leurs, gisaient au fond du cratère fumant. Du sang commença à couler abondamment de leurs plaies mortelles ou de leurs bras et jambes manquants.
La pluie commença à tomber. L’eau transforma la terre en boue et celle-ci se mêla à l’hémoglobine pour former un liquide sombre qui eût tôt fait de remplir le trou d’obus.
Gantris hurla de rage et de tristesse. Un groupe d’adorateur en déroute eût le malheur de passer à côté d’eux. Ils furent massacrés. Les trois astartes restant se remirent en route. Le sergent Gantris courait désormais pour atteindre le haut de la montagne. Sickius l’accompagnait et frère Triban, malgré son multi-fuseur, les suivait à bonne allure.
La prière se fit nettement moins forte et un cri de victoire provenant du frère-honoré Gaius Prabian, le champion de la compagnie, retentit. Peu à peu, la litanie ennemie s’évanouit et le brouillard avec elle.
Le nuage qui se trouvait juste devant les trois frères s’évanouit soudain, révélant un predator rouge, orné de symboles impies. A ses côtés se trouvaient deux Word Bearers, visiblement surpris que leur stratagème se fussent évaporé.
Cet instant de surprise leur couta la vie. Gantris écrasa le torse du premier de son gantelet énergétique et Sickius abattit le deuxième d’une rafale. Triban ne faillit pas à la réputation de fin tireur de l’escouade et fit exploser le predator d’un coup de multi-fuseur bien placé. Ils hurlèrent leur victoire, mais un flash de lumière rose et un hurlement plus sauvage, couvrit leur voix.
Sur leur gauche, à côté de l’escouade d’assaut Ixion, en haut d’une pile de cadavre, une monstrueuse créature descendait des cieux accompagnée d’une pluie de sang.
Le monstre fit tourner sa hache énorme autour de lui et trancha en deux plusieurs membres de l’escouade Ixion. Il se remit à hurler et les Word Bearers reprirent son hurlement et décuplèrent leurs efforts.
« Un Buveur de Sang de Khorne. » s’horrifia Sickius. « L’Empereur nous protège tous… »
LA BÊTE DEPLOYA SES AILES. Leur envergure était titanesque. Il décolla dans un battement pour réatterrir au bas du monticule cadavérique sur lequel il était juché. Il tua deux marines supplémentaires alors que l’escouade Ixion se repliait. Il se tourna vers l’ennemi le plus proche. Malheureusement pour les survivants de l’escouade Octavian, cet ennemi c’était eux. Aucun renfort ne pourrait les aider. Le reste de la compagnie faisait face à un renouvellement de la vigueur des troupes insurgées, renforcées par les Word Bearers survivants.
Triban fit un tir d’une rare précision et réussi à atteindre l’aile gauche de la créature.
Accompagné d’un grondement de haine, le démon fit repousser son aile dans une gerbe de sang. Il se jeta sur les trois astartes. Handicapé par son armement lourd, Triban ne survit pas à la vengeance furieuse de la créature et trépassa, décapité.
En courant vers l’abri le plus proche, Sickius et Gantris esquivèrent par chance un coup de taille de la hache démoniaque. Ils se jetèrent dans un cratère d’obus juste à temps pour éviter un nouveau revers. Sickius se releva instantanément et tira deux rafales de ses munitions explosives, directement dans le torse du Buveur de Sang. Gantris se redressa également et profita que le démon titube légèrement pour faire feu à son tour et toucher les articulations de ses jambes.
La créature chancela pour de bon et Gantris s’élança.
« Courage et honneur !!! »
D’un geste, il abattit son gantelet énergétique sur la seconde jambe du monstre qui s’effondra. D’un mouvement vif du bras, le démon envoya Gantris voltiger quelques mètres plus loin. Un cri familier parvint aux oreilles de Sickius et une épée trancha le bras qui venait de frapper Gantris. Le sang crépita sur la lame énergétique. Cato Sicarius adressa un signe de tête à Sickius et dégagea sa lame du bras fendu. Derrière lui son escouade commandement était occupée à contenir une marée de cultistes.
Mais soudain le démon se releva vivement en fit chuter Sicarius au niveau de Sickius. Ce dernier craint alors que le démon allait faire repousser ses pertes, mais il semblait affaibli. L’épée de Sicarius glissa jusqu’aux pieds de Sickius. Et au milieu d’un carnage total, Samnael Sickius prit la bonne décision.
Il s’empara de l’arme et plongea vers le démon, lui enfonçant la lame dans le torse. Le Buveur de Sang hurla et se débattit, mais Sickius, plus par chance que par tactique, releva l’épée au bon moment pour parer le coup désespéré du monstre. Malgré tout il prit le poing de son adversaire directement dans les optiques. Il jeta rapidement son casque et releva la lame. Il sectionna brutalement la main qui tenait la hache du démon, puis d’un habile revers, il décapita la bête.
La tête tranchée hurla encore pendant un moment avant d’exploser dans un déluge de sang et de flammes roses. Le reste du corps fit de même et repeint l’armure bleue de Sickius en rouge.
Autour de lui, la bataille se calmait peu à peu, les traîtres étant démoralisés par la chute prématurée de leur demi-dieu. Sicarius profita de l’accalmie pour enlever son casque et venir se tenir aux côtés de Sickius qui restait ébahi par l’acte qu’il venait d’accomplir.
« Tu viens d’accomplir un grand acte de bravoure frère. Il restera gravé dans les mémoriaux. Je vais reprendre ça. » Il prit l’épée et tapa amicalement l’épaulière de Sickius. « Un grand blasphémateur est tombé. Tu peux en être fier. Maintenant, il nous reste une bataille à finir. Remettons nous au travail. »
Sickius acquiesça et Sicarius fit le signe de l’aquila. Le capitaine repartit rejoindre son escouade de commandement. Sickius chercha du regard son sergent. Il l’aperçut enfin. Mais quelque chose n’allait pas. Il ne marchait pas normalement. Sickius se précipita pour le soutenir.
« Frère sergent ! Vous allez-bien ? Je fais venir l’apothicaire.
_Ne dérange pas l’apothicaire pour si peu. »
Frère Gantris était taché de sang et de boue et sentait la mousse antichoc caractéristique des brèches dans la carapace noire de son armure. Son casque était ébréché et il le jeta de sa main valide. Une bonne partie de son flanc droit manquait.
« Il a de sacrés reprises ce grand enfoiré hein ? » dit-il en crachant du sang. « Je suis mal retombé on dirait…Kof kof… Tu peux être fier de ce que tu viens de faire… Kof kof kof kof…
_Arrêtez de parler sergent.
_Non. Pas de sergent, maintenant nous sommes frères toi et moi. Regarde ces morts autour de toi…kof… ceux là sont nos frères, nous les avons perdus ensemble… ceux là…kof kof… sont nos ennemis, nous les avons combattu ensemble. Nous sommes frères. C’est ce lien… kof kof kof… kof…kof kof… ce lien… ce lien qui nous différencie des xénos… ou des… kof kof… traîtres… »
C’est là que tout bascula.
A ces mots un des adorateurs répandu sur le sol, supposé mort, envoya sa lance dans la plaie grandement ouverte de frère Gantris. La lance lui transperça tout le torse et le fit s’écrouler.
Prit d’une rage intense, Sickius dégaina son bolter et exécuta l’adepte sans sommations. Il se pencha vers Gantris et appela l’apothicaire en urgence.
Lorsque l’apothicaire fut arrivé, le sergent Gantris était déjà mort.
QUELQUES MINUTES APRES la mort du dernier membre de son escouade, Sickius s’était vu décerner le grade de sergent de l’escouade Octavian et on lui avait promit de lui décerner la Victorex Maxima pour avoir occis le démon majeur. Des récompenses tellement immenses que n’importe qui tuerait pour obtenir. Mais Sickius, bien que conscient de ce que ces récompenses impliquaient, ne savait les apprécier à leur juste valeur en ce moment.
Le chapelain était venu le voir.
« Je te félicite Samnael. Cependant rappelle toi que tu ne fais pas la guerre pour les récompenses, mais pour l’Empereur.
_Je le sais frère-chapelain. Et j’accepte ces récompenses avec humilité.
_Je sens ta tristesse. J’ai appris que tes frères d’armes avaient péris au combat. Ne les pleurs pas, ils reposent aux côtés de l’Empereur. Ils sont morts pour ce qu’ils défendaient, l’Imperium et l’Empereur de l’Humanité. Il n’y a pas de plus grand honneur.
_Certes. Mais je souhaiterais leur rendre un dernier hommage. J’ai demandé au capitaine Sicarius de les incinérer. Il a accepté.
_Peut-être ne te l’a-t-il pas encore dit mais il a également accepté que tu te rendes sur Lucifer et place en outre l’escouade Fennion sous tes ordres le temps qu’il faudra. Es-tu sûr de toujours vouloir y aller ?
_Oui. Je reformerai l’escouade Octavian en recrutant les meilleurs tireurs chez les novices. Ils seront prêts dans deux semaines et nous arriverons à Lucifer dans moins d’un mois si tout se passe bien. Soit une semaine avant le gouvernement du nouveau gouverneur. Je pensais même rejoindre leur flotte avant qu’ils ne débarquent.
_Je ne suis pas sûr que ce soit le bon ch…
_Ma décision est prise frère. » Trancha Sickius.
_Bien, alors va, et honore l’Empereur. »
Le chapelain frappa son plastron du poing et s’en alla. Sickius alla voir l’escouade Fennion et les briefa rapidement sur la situation. Il était alors loin d’imaginer qu’il n’arriverait malheureusement pas à temps sur Lucifer.
Une fois les explications terminées, il leur emprunta leur lance-flamme.
Un dernier adieu à faire.
Voilou, ceux de DoW 2 connaissent peut-être déjà, sinon pour les autres, ben... vous connaissez pas!
J'espère que ça vous plaira! La suite est en préparation!